Danièle Sallenave : face au silence démocratique, quelle parole légitime ?

Mains en l'air ©Getty - John Rensten
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Quand une parole devient-elle légitime ? Une réflexion sur la parole démocratique et sur son silence, avec l'écrivaine et académicienne Danièle Sallenave, qui publie un tract Gallimard : "Parole en haut Silence en bas" (2021).

Avec

Danièle Sallenave est auteure et membre de l’ Académie française.  Après une thèse sous la direction de Roland Barthes, elle publie son premier récit en 1975 : _Paysage de ruines avec personnages__._ En 1980, elle se voit décerner le prix Renaudot pour Les Portes de Gubbio. Elle est aussi l’auteure d’une trentaine d’ouvrages, romans, essais, récits de voyage, pièces de théâtre. 

Danièle Sallenave est aussi l'auteure d'essais. Après Jojo le gilet jaune (tracts Gallimard, 2019), qui revenait sur la question du mépris de classe, elle publie Parole en haut silence en bas (« Tract Grand Format » Gallimard, 21.01.21), une réflexion sur le silence des citoyens. Ainsi, en octobre 2020, une succession d’actes terroristes en France, dont le meurtre de Samuel Paty, a suscité de nombreux hommages officiels et des débats dans les médias. Mais le simple citoyen, lui, se tait, et à lui s'impose la répétition de mots inquiétants : islam, terrorisme, immigration...

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Je souhaiterais qu'on mette en place des instances de débat démocratique pour que se fassent entendre des opinions qui peuvent être contradictoires; la démocratie, c'est la contradiction. (Danièle Sallenave)

Or l'autrice veut, aujourd'hui plus que jamais, connaître l'opinion de ses concitoyens, la démocratie étant d'abord le lieu de l'échange, du conflit et de la délibération. Le discours officiel ne se soucie pas d’ouvrir un grand débat démocratique qui associerait les citoyens aux décisions. Le citoyen ordinaire n’a que rarement l’occasion d'user publiquement de la liberté d’expression. 

Surtout, ce citoyen, celui que Danièle Sallenave nomme « L’Innombrable »  - caissière de supermarché, institutrice, journaliste, … - compte peu pour les hautes sphères du pouvoir, -du moins en était-il ainsi avant l’irruption des Gilets Jaunes. Il s'agit pour l'autrice de lui permettre de prendre la parole et de se défaire du sentiment d'illégitimité qui peut être le sien, véritable bâillon.

L'"Innombrable", c'est « cause toujours » : quand il parle, on ne l'écoute pas. (Danièle Sallenave)

À nous, écrit-elle, d’inventer des lieux propices à une démocratie de la délibération citoyenne : forums, agoras, sites en ligne, blogs divers. Elle cite le Discours de la servitude volontaire (1532) d'Etienne de La Boétie «Soyez donc résolus à ne plus servir et vous serez libres ». 

La démocratie est inachevée tant qu'elle n'a pas pris en compte les instances démocratiques qui vont des plus petites aux plus grandes. (Danièle Sallenave)

La Grande table culture
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