PILGRIMYSTIC POST n°17

Remontada en Dacia !

Jeudi 29 février 2022

 

Salutations chers amis,

 

Les lieux communs, c’est comme les toilettes publiques, c’est sale, ou pas, on ne sait pas trop, et, on aimerait ne pas avoir à les utiliser, mais c’est toujours pratique et utile en situation de crise.

 

“C’est en forgeant que l’on devient forgeron”

“À chaque jour suffit sa peine”

“Petit à petit l’oiseau fait son nid

“Qui ne tente rien n’a rien”

 

Ces expressions toutes faites comme on dit, sont le reflet d’un lieu commun, celui du travail, de la vertu du travail quand bien même celui-ci est pénible, douloureux, et ne paye pas sensiblement à l’instant T.

 

Aussi d’autres expressions sont venues renforcer ce premier lieu commun, non seulement c’est difficile en soi de travail à son ouvrage, qu’il y a l’enfer, c’est-à-dire les autres, qui viennent interférer dans le processus, ainsi on peut lire / entendre :

 

“Trust the process”

“Do it Now, think later”

“Glow up in process”, etc.

 

Quant à la question des autres, et donc de l’enfer, on trouve des choses très paradoxales, et très extrêmes, donc extrêmement paradoxales, ou paradoxalement extrêmes :

En effet, j’ai pu observer, non sans mal deux tendances, qui finalement n’en sont qu’une seule, avec les deux faces de la même pièce.

 

L’être humain, même s’il a beau le nier, a besoin de reconnaissance, même si ce n’est pas celle de la foule, ou celle de son chien, il désire, la sienne, envers sa propre personne, et s’il est capable de se satisfaire lui-même, sans que son appréciation de lui-même ne doivent nécessairement transiter par celle d’autrui, faisant de son jugement (dernier), finalement, la somme des likes et dislikes, que l’algorithme lui aura transmis.

 

L’autre extrémité dont je parlais c’est la réussite, au sens social, de la personne qui prodigue et ne partage (sur les réseaux sociaux, en galerie, sur scène) que du contenu, dont le fond incite à se défaire de l’avis des autres, en parvenant, à recueillir un très grand nombre de likes.

 

Cette dernière position n’est pas une forme d’arnaque, mais elle représente à la perfection le fonctionnement du cerveau humain.

 

Sans entrer dans les détails, il est question ici, de ce qu’on appelle rapidement le circuit de la récompense. En neurosciences, en effet, il est intéressante d’observer la production de certains neurotransmetteurs en fonction d’un stimulus.

 

Les plus faciles d’accès et intéressants dans le sujet qui nous intéresse ici, ce sont la dopamine et la sérotonine.

 

Ces deux neurotransmetteurs sont antagonistes, plus vous avez de sérotonine, produite, en continu parce que vous êtes heureux (c’est très schématique et simplifié), moins vous allez produire de dopamine, qui est sécrétée avant l’arrivée d’une récompense (et non pas au moment de celle-ci), c’est une libération de sensation de plaisir avant que l’effet final de l’action y ayant mené ne soit terminée.

 

Ainsi, d’un point de vue jugement / avis d’autrui, et langage actuel des réseaux, cela signifie que vous libérez / sécréter de la dopamine, non pas lorsque vous avez un commentaire positif sur votre production / publication, mais uniquement au moment où vous voyez une notification de quelque chose sur votre réseau social, boîte mail, livre d’or, que sais-je !?

 

La dopamine a été produite uniquement à l’idée d’avoir reçu quelque chose, sans même en avoir pris connaissance.

Cela prouve donc que le plus important est l’interaction avec autrui, et pas le contenu, ni de la production publique de l’un, ni l’avis donné de l’autre à son sujet…

 

Mais où est ce que je veux aller avec tout ça moi ?

 

Je ne sais plus vraiment, mais je reprends à partir de l’antagonisme sérotonine - dopamine.

 

Quelqu’un en manque de sérotonine aura besoin, ou produira plus facilement de la dopamine. Or, le plaisir provoqué par la production de la dopamine étant de courte durée, et finalement, intervenant avant la récompense, il gratifie plutôt la motivation, d’une dose intense mais très brève de plaisir. Ainsi, on aura plus de motivation et d’enclin à produire peu et vite pour avoir sa dose.

 

Sa dose de quoi ? De dopamine ok, mais à quel prix ?

 

À tout prix, puisqu’il suffit de voir que la publication faite génère un nombre supérieur ou égal d’interactions pour stimuler la production de dopamine.

 

Or plus il y a production de dopamine, moins il y a production de sérotonine.

La sérotonine est communément appelée l’hormone du bonheur (un plaisir, une joie durable et stable dans le temps, tout le contraire du plaisir ponctuel qu’associe la dopamine). Une personne en déficit de sérotonine, pourra se retrouver dans un état de détresse grave, qu’on nomme dépression.

 

Les anti-dépresseurs sont en effet des médicaments, concentrés en sérotonine, qui permettent de donner l’illusion au récepteur qu’il est en état de bien-être, de bonheur.

 

C’est là que je suis censée retomber sur mes pattes et faire le lien avec le début de ma lettre, qui était si évident dans mon esprit….

 

Oui donc, tout ça pour parler du point de vue de l’artiste.

 

Si on prend l’expression de Shakespeare, et de tous les autres baroques comme postulat : Theatrum mundi (là aussi un énorme lieu commun d’ailleurs, pour lequel Cervantes va se moquer à travers son Dom Juan).

 

Donc en admettant que nous jouons tous consciemment et surtout inconsciemment un rôle sur la scène (théâtre) du monde (d’où theatrum mundi), nous avons tous une scène, et donc un public.

 

Ce public, même s’il n’est pas nombreux, même s’il ne paye pas son entrée pour venir vous voir, et qu’il vous jette des tomates et hue votre prestation (coucou les Haters !), donc ce que vous êtes, hé bien, inconsciemment, même si vous vous efforcez de croire que vous en êtes détachés, que vous ne tenez pas compte de leurs critiques, inconsciemment, non seulement, mais surtout par besoin, par nécessité, et par raison organique / physiologie / biologique, vous voulez leur plaire, ou tout du moins les faire réagir.

 

Ainsi, même sans être officiellement des artistes qui nous mettons en scène, qui publions nos oeuvres, nous sommes le reflet de notre propre travail, notre corps, notre comportement, nos réactions, tout cela est notre oeuvre d’art, et pour ceux qui diraient que c’est l’oeuvre d’un démiurge, n’oubliez pas que Dieu a voulu et fait l’Homme libre.

 

Vous n’êtes peut-être pas “artiste”, mais vous êtes artisan, de vie, vous avez sculpté dès votre venue sur terre, votre corps et votre esprit, et vous voulez que le monde le voit, peu importe que ce soit positif ou non, vous avez besoin, en tant qu’être humain de savoir que vous existez.

 

Savoir qu’on existe, si on ne crée pas d’art extérieur à nous, c’est en étant nous… face à autrui…

Bienvenue en enfer !

 

L’ermite, l’anachorète, le marginal, ce sont ceux qui font un effort, qui contournent, contredisent la biologie humaine, pour visiter l’insociable de notre évidente sociabilité.

Mais de ceux-là je parlerai une autre fois…

 

Pour ma part, je commence à accepter tout cela, et donc mon humanité oxymorique au possible.

Je me méfie de l’Homme, “l’homme est un loup pour l’homme”, Hobbes, et en même temps, je veux travailler à mon grand oeuvre, sans me mentir.

 

Mentir, ce serait par exemple ne présenter que ce que je considère comme réussi… Et de ce fait, me faire croire à moi-même que je réussis plus que je n’échoue.

 

Sauf qu’il n’en est pas du tout ainsi…

 

Je ne sais pas vraiment si le talent existe, s’il existe, il doit être soit très rare, soit hyper courant, et en plus, je crois que Platon a été un bon paquet là-dessus (c’est dire), mais je sais que le travail, l’effort, la douleur, la peine mise en oeuvre à vouloir obtenir quelque chose, à vouloir progresser, s’améliorer, ou tout simplement à être, je sais que tout cela existe, et ça fait du bien… ("Il n'y a que les cons imbéciles qui ne changent pas d'avis !")

 

Parce que même si je ne cherche pas la gloire, la reconnaissance, le succès, j’ai besoin de réussir, d’avoir des preuves tangibles de mes progrès, et j’essaye de me suffire en matière de jugement de mon travail.

Sauf, que j’ai compris que mon corps a besoin, pour se motiver, d’un certaine relation / interaction autour de mon travail avec autrui.

 

Cet autrui, je le choisis, je n’ai plus l’âge de me jeter dans la gueule du loup. J’ai beaucoup de chance de ne pas dépendre des résultats et donc de l’appréciation générale / majoritaire de ce que je produits, ni de ce que je suis.

 

Je travaille à toujours être seul maître à bord, d’où ma forte tendance à l’érémitisme, ainsi, je ne désire que des choses à échelle humaine, de mon niveau : c’est pour ça que je fais ma remontada en Dacia, et pas (encore) en Koenigsegg CCXR Trevita (j’ai trouvé cette voiture en résultat de recherche “voiture la plus chère du monde”, cliquez ici si vous aimez les ronronnements et la belle mécanique !).

 

En vous remerciant de pouvoir vous compter parmi mon “autrui”,

 

Je vous souhaite à tous un Merveilleux Chemin,

Que la Paix soit sur vous !

 

Habiba Hafsaoui-Hellégouarch

Si vous pensez que cette lettre peut plaire à quelqu'un, n'hésitez pas à la lui transférer.

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