Stress sans conscience n'est que ruine de l'âme

(conclusion de mon mémoire de praticien Vittoz IRDC en 2011)

En choisissant le thème du stress au travail, je ne m’attendais pas à découvrir une situation de souffrance aussi dramatique et en pleine expansion dans nombre d’entreprises. Selon moi, une telle situation ne pourra pas perdurer longtemps, et les entreprises et le monde du travail ne pourront pas faire l’économie de prendre en compte cette réalité et de proposer des changements pour accompagner ce stress, cette souffrance et cette perte de sens dans le travail, afin que les personnes reprennent confiance dans leur propre valeur et dans l’intérêt pour leur travail.

Comme j’ai essayé de le montrer dans ce mémoire, cela passera sûrement par une véritable éducation et une prévention sur les réalités du stress et de ses conséquences sur la santé, afin de faire prendre conscience que le stress est aussi un indicateur à être plus vigilant sur ce qui est vécu par chaque individu, au niveau psychique et corporel. Les entreprises devront agir sur leurs organisations et leurs attentes pour faire diminuer le stress ambiant, et aider les individus à développer leurs propres ressources internes pour y faire face. Concrètement, cela passera par l’allocation de lieux de ressourcement et de partage de parole pour permettre de faire redescendre la pression, et recréer un sentiment d’appartenance à un collectif porteur de solidarité. Des outils comme les pratiques Vittoz ou des séances de méditation pourraient être proposés pour accompagner ces phases de détente et de ressourcement.

Mais cette crise existentielle déborde largement les murs des entreprises, elle est sociétale. Elle pose la question de la place de l’homme dans notre société. Comme j’ai pu le montrer à travers mon cas personnel, il y a une trentaine d’année, l’enseignement scolaire porteur des valeurs de mai 68, était basé sur l’acquisition d’un maximum de connaissances pour éduquer des « têtes bien faites », avec le fameux Quotient Intellectuel (QI) mis en avant. Depuis, le célèbre psychologue Daniel Goleman dans son best-seller mondial L’intelligence émotionnelle publié en 1998, a démontré que notre réussite dans la vie dépendait moins de notre QI ou de nos diplômes que de notre savoir-faire émotionnel (QE), qui est notre capacité de comprendre,  maîtriser et cultiver nos émotions. Il est symptomatique de noter que ce même Daniel Goleman, vient de sortir un nouveau livre en 2009, qui s’appelle Cultiver l’intelligence relationnelle, en s’appuyant sur les dernières découvertes des neurosciences. Dans ce livre, il montre que les neurones qui orchestrent nos sentiments et nos actions, mais aussi nos états hormonaux et immunitaires, sont « sociaux », ils entrent en résonance avec les neurones d'autrui et se « nourrissent » de cette relation. Si celle-ci est bonne, notre état intérieur se renforce ; si elle est mauvaise, il s'affaiblit. Cela montre bien que l’homme, cet animal social, n’a pas d’autres choix que de trouver des solutions collectives à cette situation [de stress endémique], et donc de mettre en place des stratégies pour rompre ce sentiment d’isolement et d’enfermement.

Cette révolution souhaitable pour réinventer un pacte social du « vivre ensemble » passe par des prises de conscience et un changement de regard sur soi-même et son individualité, et par réaction sur l’autre et sur la vie en société. Certains penseurs reconnus disent que nous sommes à la veille de profonds changements sociétaux, d’un « Apocalypse », dans son sens étymologique de dévoilement. Nous sommes collectivement aveuglés par notre réussite sociale, qui en fait est portée par une soif intarissable de reconnaissance par les autres de notre existence et de notre valeur individuelle. Le problème est que le moteur de cette reconnaissance ne fonctionne plus, tant les gens enfermés dans leur solitude et leur souffrance ne se regardent plus, ne se reconnaissent plus.

Comme l’écrit Guy Corneau dans son livre « Le meilleur de soi » : « le besoin de reconnaissance qui nous tenaille tous est un besoin de reconnaissance de notre réalité universelle. Voilà pourquoi il revient d’abord à chacun et à chacune dans son intimité de reconnaître la réalité de son âme (« ce qui fait que je suis « je » même si tout le reste de ma réalité s’écroulait », selon la définition du penseur indien Sri Aurobindo). Le besoin d’être reconnu sans cesse adressé aux autres s’en trouvera fortement diminué car notre désir profond et inconscient est d’être reconnu comme faisant partie de la grande famille universelle. Peu de gens peuvent reconnaître notre réalité universelle, toutefois, si vous vous appliquez à accueillir chaque personne que vous croisez comme un être universel, cela contribuera au renouvellement de la fraternité humaine. La paix mondiale est en rapport étroit avec la capacité de chacun de se voir et de voir les autres comme faisant partie de la même âme pour ainsi dire. » 

Le changement du monde passera nécessairement par cette prise de conscience et cette révolution intérieure. Je suis persuadé que le Vittoz sera un outil majeur pour construire les bases de cette révolution. Pour terminer ce mémoire, je rappelle que le docteur Vittoz a écrit : « accepter la vie présente, c’est être susceptible de l’améliorer dans l’avenir ».

Alors, les sens toujours plus en éveil, avec une attention souple et soutenue à soi, aux autres et à mon environnement immédiat, j’agis pour participer à cette transformation dans la conscience du moment présent. Beau et noble travail en perspective.

Depuis 2020, le Covid est arrivé, comme un révélateur et un amplificateur de cette situation pandémique de stress et de mal-être dans la société, dénoncé par l'OMS dès 2004 qui invitait les organisations humaines à développer des programmes de prévention du stress et de promotion de la santé physique et psychique. La crise sanitaire actuelle symbolise le passage d'une invitation à une obligation de changer de paradigme, à se réinventer et à réinventer nos liens sociaux pour se réenchanter et réenchanter le monde. A chacun de jouer, à partir d'ici et maintenant.

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Patrick BOBICHON

Praticien de la psychothérapie Vittoz

Instructeur FOVEA

Directeur de la formation d'Instructeurs FOVEA

Pour Particuliers, Groupes et Organisations

En cabinet, sur site et par vidéo.

Qui suis-je ?

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