SOUVENIR DE L'EXPOSITION LE PARTAGE D'UNE PASSION POUR LE DESSIN À L'ÉCOLE DES BEAUX-ARTS DE PARIS
Sigismondo Caula (1637-1724), Jeune femme, la tête renversée en arrière, lavis de sanguine, rehauts de blanc, traits de pierre noire sur papier beige, 196x212 mm, Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts – Cabinet Jean Bonna
L’exposition qui vient de s’achever à l’École des Beaux-Arts nous a permis de découvrir les feuilles acquises ces dernières années. Parmi elles, cette magnifique sanguine de Sigismondo Caula (1637-1724), don du Cabinet des amateurs des dessins de l’École des Beaux-Arts en 2018.
Originaire de Modène, un centre artistique constitué autour de la famille d'Este qui fait de la ville la capitale du duché en 1598, il se forme auprès du français Giovanni Boulanger de Troyes (1606-1660) sur les chantiers ducaux.
Caula met ici en scène une femme allongée sur un lit recouvert de draperies. La pose trouble et sensuelle du personnage, dont l’épaule désarticulée se confond avec la poitrine, suscite un questionnement sur son état ; évanouie, morte, alanguie ? Les erreurs anatomiques sont soulignées par le raccourci et l’angle du dessin. Elles créent un sentiment de malaise chez celui qui observe la femme ; une figure isolée dont les draperies ne permettent pas la compréhension d'un contexte.
L’utilisation remarquable du lavis de sanguine souligne les plis cassés. Tout comme l’anatomie du modèle, les drapés ne se forment pas dans un mouvement naturel mais de manière cassante, l’étendue claire du drap rompue par le lavis. Cette utilisation contrastée de la sanguine et des rehauts de blanc se retrouve dans les autres productions graphiques de l’artiste.
Son corpus de dessins n’est que peu connu – l’on citera néanmoins l’article d’Adalgisa Lugli en 1980 – attestant de la chance qu’est cette acquisition pour les collections publiques françaises. Notons une Vierge et l'Enfant adorés par un ange et un saint (recto) ; Homme drapé assis, vu de dos (verso) au musée des Beaux-Arts de Besançon (inv. D.3137) et une Femme drapée penchée en avant au musée Tavet de Pontoise (inv. D. 899.34.99). Le dessin de Besançon était anciennement attribué à Tintoret ; celui des Beaux-Arts à Tiepolo. Un voyage à Venise dans les années 1667 à 1670 permet à Caula de découvrir les peintres vénitiens et leurs couleurs chatoyantes, mais également la lumière qui se retrouve ici dans la clarté du dessin et les rehauts de blanc.
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Pour en savoir plus :
A. Lugli, « Erudizione e pittura alla corte estense: il caso di Sigismondo Caula (1637-1724) », Prospettiva, 21, avril 1980, pp. 57-74.
E. Brugerolles (dir.), Le partage d'une passion pour le dessin. 2, Paris, 2022.