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Penser pour panser les liens

lettre #août 2022 - le jeu des possibles <img height="22" src="https://static.wixstatic.com/media/5e9922_6047ac2b0fe24f88bcf6fa54fdde792e.png_256" width="22"> 

 «Nous étions deux amis. Nous sommes deux étrangers. »Friedrich Nietzche in Le Gai savoir

 

 

 

Le chagrin d'amitié

 

«Parce que c'était lui, parce que c'était moi », disait Michel Montaigne avec une certaine tendresse, à propos de son ami La Boétie. 

Il désignait ainsi ce que ma patiente exprime lorsqu'elle évoque, plus de vingt années après, le résultat d'un choix dit d'objet avec la reconnaissance d'une union réelle et affective, la bienveillance, l'intimité, la réciprocité, l'égalité, la ressemblance, en bref le choix d'une personne parmi tant d'autres qui, à ses yeux, prend valeur d'élue.

Certes, ce mouvement dès le départ de la mise en relation avec l'altérité s'exprime avec force. Il attache ou associe les êtres, mais c'est de manière inconstante mêlée parfois de tendresse et de cruauté. Et ces variations sont déterminées soit par de vagues ressemblances entre les êtres, soit par des différences, sans qu'il soit le plus souvent possible de bien distinguer les unes et les autres.

 

Trois termes permettent d'affiner la distance entre l'éros et l'amitié :

L’amour Agapé est un amour fraternel, universel, altruiste, spirituel. Il se donne, sans prix à payer, de manière désintéressée. C'est un amour inconditionnel, qui accepte l’autre tel qu’il est, avec ses qualités et ses défauts. Il souhaite le bien-être de son ami sans en tirer commerce. Il a de la compassion pour l’autre et l’aime… même s’il n’est pas aimé de lui. C’est un amour affranchi de l'ego qui se situe au-delà de l’émotionnel. 

L’agapè est le terme grec employé par les penseurs chrétiens pour inscrire dans la nature humaine l’amour du prochain que la religion exalte. Ce concept permet de distinguer l’amitié « désintéressée » des autres formes de sentiments affectifs et amoureux, et de prouver l’existence en chaque créature d’une tendance humaine désintéressée à aimer son prochain, puis érigée en devoir, tendance reflétant l’amour du créateur pour toute créature dans le cœur des créatures elles-mêmes.

 

L’amour Philia est l’attachement lié à un sentiment d’amitié, associé à des valeurs, des centres d’intérêts et des objectifs communs. Il prend appui sur des plaisirs partagés, des interactions, du jeu, de la solidarité et de la complicité. La relation est chaleureuse et affective, chacun ayant le souci de l’autre. Cependant, il est conditionnel car fondé sur des activités ou des vécus partagés. L'amitié est une relation d'affection mais elle peut ne pas être payée en retour de l'investissement colossal dont elle est chargée.

 

L’amour Éros est fondé sur une relation sensuelle, charnelle, sexuelle, éventuellement amoureuse et passionnelle. Ce peut être l’ivresse d’un   « coup de foudre » qui induit un fort désir de l’autre. Cela peut être délicieux et… ravageur. Il y a un risque de vivre une illusion, d’aimer l’image de l’autre basée sur des fantasmes et l’imaginaire. Le partenaire peut être vécu comme un objet d’amour conditionnel où l’ego possessif prend toute la place. Si l’attachement à une personne est uniquement conditionné par une passion érotique, le risque de perdition est présent.

Cependant l’amour Éros peut initier une relation qui évoluera vers l’amour Philia ou Agapé afin de se vivre harmonieusement au long cours.

Car entre entre l’Eros et la Philia, (amour et amitié selon Platon) il y a une logique commune d’attraction – qui implique, intrinsèquement, la possibilité d’une non-réciprocité.

 

L'amitié procède dans la dialectique du Même et de l’Autre à une « convertibilité vertigineuse des contraires », (Jacques Derrida) qui démontre que les rencontres d’une vie peuvent défier les catégories de la pensée comme, peut-être, de l’analyse. 

Pour estimer que deux êtres sont diffèrents l’un de l’autre ou sont différents de soi, il faut commencer par être soi-même quelqu’un. C’est de cette manière un peu brutale qu’on peut poser le problème des relations subtiles et complexes qui unissent le même de l’homme à son autre ami. 

Nous savons que le Moi se constitue à la faveur d’une rencontre avec l’Autre, que celui-ci joue un rôle majeur dans l’émergence du soi individuel et dans l’accès à la conscience de soi, et que la rhétorique de l’altérité s’exprime dans cette expérience de la rencontre, de la reconnaissance, voire de la peur de l’Autre qui peut conduire à son inclusion/exclusion.

 Il ne suffit pas de souhaiter être ami pour le devenir. Dans certains contextes, on peut aimer d'amitié sans être aimé en retour. 

L'amitié demeure-telle inséparable de la haine ? Nous faut-il envisager tôt ou tard de "savoir haïr ses amis", d'aimer les combattre,  tout en pensant que notre propre méchanceté est bien naturelle, impersonnelle, donc innocente?

 

C'est ce à quoi je réfléchis lorsque j'entends avec une réelle émotion parler de "chagrin d'amitié" comme lorsque d'autres voix parleront de "chagrin d'amour".

 

Le vis-à-vis qu’instaure l’intersubjectivité dans l’amitié ne saurait être compris sans cette ambivalence de l’amitié, laquelle suppose une certaine distance ou ce que Nietzsche nommait le « pathos de la distance ». 

 

 
Formation Novembre 2022 Liaisons et déliaisons de l'attachement
 

 

    Appétit sexuel hors-normes

 

Fétichisme, engagement dans des relations sexuelles sans aucune émotion, voyeurisme, exhibitionnisme, travestisme, sadomasochisme,  Don Juanisme,  masturbation compulsive, rapports sexuels non consentants, harcèlement sexuel, frotteurisme, rapports sexuels avec des mineurs, nymphomanie, comportements sexuels compulsifs et impulsifs, perte de contrôle sexuel, trouble de l’hyper-sexualité, masochisme sexuel... si Prévert était parmi nous, peut-être soulignerait-il à nouveau que " L’amour, c’est toujours mieux de le faire ! "Fesse, queue, doigt, advienne que pourra ! "

Et il ajoutait proche des surréalistes : " Alors, mon garçon ! À choisir, tu prendrais quoi ? dans ce menu qui qualifie l’addiction sexuelle et les troubles sexuels compulsifs.

 

Repartons dans l'étymologie pour tenter de saisir ce que le mot comporte en lui comme notions.

 

Dans le Dictionnaire étymologique de la langue latine d’A. Ernout et A. Meillet, le premier sens du radical latin est celui de "montrer".

Ad dicere signifie dico, dicere dans le sens de « montrer ou faire connaître par la parole, dire ou être dit à ».

Dans la Rome antique, un addictum (addicté) était un esclave pour dette, c'est-à-dire une personne n'ayant pas pu rembourser une avance ou une somme auprès d’« un débiteur dont l’attribution à son créancier a été juridiquement prononcée » et ce avec « la contrainte par corps »

Addiction, comme substantif, indique le penchant ou l’attachement d’une personne à quelque chose.

La seule (mais importante) différence entre la condition de l’addictus et celle du seruus « esclave » est que le premier pourra recouvrer sa liberté quand il aura payé sa dette.

Addicté comme adjectif se réfère à une personne encline à une pratique ou de conduites bien définies.

L’addicté apparaît comme celui qui volontairement et fatalement est destitué et ramené à une condition inférieure. Les circonstances lui retirent son identité ou lui en font prendre une, mal appropriée, parce que c’est l’unique moyen possible de payer sa dette. C'est dire la détresse et l'absolu de l'être confronté à de telles injonctions internes et externes.

 

Que nous comprenions l'addiction dans son sens étymologique (juridique) ou dans le sens employé aujourd'hui, nous retrouvons l'aliénation de l’individu et la destruction de la personnalité.

 

Les relations d'objet (Joyce mac Dougall,) la douleur de la séparation et la perte de l'objet, la dépendance (anaclitisme), les pathologies du lien, les manifestations dépressives et les mécanismes de défense (clivage, identifications, déni, …) sont à interroger dans l'addiction.

Dans l'addiction, il y a comme une réponse qui va devenir quasi automatique, et exclusive (la répétition) face aux difficultés rencontrées. Toute la psyché est occupée par "ça".

 

Dans l’addiction, le corps pulsionnel, le soma mais aussi le corps imaginaire sont convoqués, et si je peux dire, comme engagés. Nous retrouvons donc la              " contrainte par corps " de celui qui doit payer sa dette.

 

L'extention vers une interprétation psycho-pathologique de la dépendance à un produit ou à une situation implique la perte de liberté, aléatoire, qui se dit dans l’addiction par les actes, la répétition, l'avidité de la jouissance, la destructivité. Gardons en tête également que sur le marché du sexe, les individus seraient produits et objectifiés comme des marchandises.

 

Sénèque déjà invoquait « des désirs et des passions de la chair » (in Lactance, Institutions divines 7, 20, 8.) en soulignant la dépendance sans rémission ni échappatoire de l’homme soumis à ses désirs amoureux et ses pulsions sexuelles.

 

Cette problématique singulière est souvent taboue malgré la souffrance, le dégoût, la honte et même le désespoir qui agitent les addicté.e.s. Cela peut renforcer le sentiment de l'isolement social (monstre sexuel). D'autant qu'une intensification (répétition) des besoins s'installe et que les phases s’intensifient, le comportement accapare progressivement tous les domaines importants de l’individu. Tel l'esclave, il n’est plus acteur de sa vie, sa liberté de choix est entravée.  

 

L’exploration des facteurs de vulnérabilité s’inscrit dans le vécu du sujet en souffrance ; il est important d’évaluer leurs liens avec le trouble addictif.

L’addiction sexuelle se manifeste par une sexualité excessive, envahissante, incontrôlable dont la personne souffre et qui conduit souvent à des conséquences négatives importantes (difficultés conjugales, déprime, honte, infections sexuellement transmissibles, sentiments de culpabilité,  de désespoir, de solitude, d’ennui, de faible estime de soi, de lutte contre des émotions négatives, de la rationalisation...) 

Le fantasme de devenir objet du désir rend les hommes vulnérables. Ils se retrouvent prisonniers de leur propre désir et acceptent, de ce fait, d’aliéner leur souveraineté de sujet consommateur.

 

La psychanalyse est un complément indispensable à la sexologie par les liens qu’elle tisse entre la sexualité fonctionnelle et une sexualité avec une dimension psychoaffective, liée à l’histoire individuelle, à l’identité de la personne, dans une approche intégrative.

Revenons au rêve du poète : "La poésie, c’est ce qu’on rêve, ce qu’on imagine, ce qu’on désire et ce qui arrive souvent (…)" Prévert.

 
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