Faut-il surtaxer les livraisons express pour décarboner les transports de marchandises ?

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Faut-il surtaxer les livraisons express pour décarboner les transports de marchandises ?

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Le e-commerce a augmenté de 30% entre 2019 et 2020 [photo d'illustration].
Le e-commerce a augmenté de 30% entre 2019 et 2020 [photo d'illustration].
© Maxppp - PHOTOPQR/L'EST REPUBLICAIN

Dans un rapport, l'organisme France Stratégie formule plusieurs recommandations pour verdir les transports de marchandises. Il propose notamment de sensibiliser les consommateurs et de faire payer plus cher les livraisons express.

Quelques clics suffisent aujourd'hui pour commander un vêtement ou un objet sur Internet et se le faire livrer en quelques heures chez soi. La pratique est de plus en plus répandue : le e-commerce a augmenté de plus de 30% entre 2019 et 2020. Tout va toujours plus vite et certains consommateurs en profitent même pour commander plusieurs tailles ou couleurs de vêtements sur Internet, les essayer chez eux et renvoyer les articles qui ne vont pas. Cela se traduit par une multiplication des camionnettes de livraison sur les routes et donc des émissions de CO2, de la pollution et des bouchons en ville. À tel point que le phénomène commence à inquiéter les experts.

Mieux réglementer les livraisons de colis à domicile fait partie des recommandations figurant dans un rapport de France Stratégie, un organisme d'analyse de prospective rattaché à Matignon, et du Conseil général de l'environnement et du développement durable. Ces deux organismes se sont penchés sur les façons de décarboner les transports de personnes et de marchandises dans les années à venir. Le rapport formule plusieurs recommandations, et notamment celle de réglementer les tarifs de livraison pour pousser les consommateurs à plus de sobriété.

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Des camionnettes qui circulent très peu remplies pour respecter les délais

"Le premier problème, celui qui a le plus gros impact, ce sont les livraisons express", explique Régine Brehier membre du Conseil générale du développement durable qui a co-dirigé ce rapport. "On en arrive même à ce qu'on appelle 'la livraison instantanée', qui est la livraison en moins de deux heures. C'est quelque chose qui pèse énormément car quand on demande un délai de livraison très court, les camionnettes circulent très peu remplies pour pouvoir respecter les délais."

Le rapport recommande de sensibiliser le client en lui indiquant par exemple le bilan CO2 de ses colis, même s'il est encore très difficile à calculer avec précision. Il plaide aussi pour "éviter de faire de la livraison express l’option par défaut", "interdire la mention 'livraison gratuite'", "faire payer la livraison, et en particulier la livraison express, à un tarif incluant son impact environnemental" et mettre en place "une mesure de taxation des colis, assortie d’une surtaxe des livraisons instantanées". 

"L'idée serait de faire payer les livraisons plus cher lorsqu'on demande un délai très court", indique Régine Brehier. Et cela devrait concerner "tout le monde, c'est-à-dire qu'on ne peut pas imaginer un vendeur qui prenne l'initiative de le faire tout seul", précise-t-elle. "Il faut que la même règle s'applique à tout le monde." L'idéal serait selon elle une réglementation à l'échelle mondiale ou au moins à l'échelle européenne.

Le rapport s'inquiète aussi des conditions sociales des livreurs, soumis à une pression pour aller toujours plus vite. Les exigences des consommateurs qui veulent recevoir rapidement leur colis encouragent les cadences infernales.

Des alternatives pour des livraisons plus vertes

Plusieurs grandes agglomérations ont commencé à réfléchir à la façon d'optimiser les tournées des livraisons urbaines avec l'installation d'entrepôts dans des lieux stratégiques ou la mise en place d'incitations pour effectuer les derniers kilomètres de livraison en véhicules électriques ou en vélo-cargo. C'est le cas notamment dans les Zones à faible émission. À Paris par exemple, le transport de marchandises à vélo est en pleine expansion, grâce au développement des pistes cyclables et au vélo cargo électrique, capable de transporter de grosses charges sans effort. À Toulouse et à Strasbourg, c'est le transport fluvial qui a fait son grand retour, complété par des vélos électriques, pour alimenter les centres-villes.

Mais le boom du e-commerce est récent, les usages se sont développés avant que ses impacts environnementaux n'aient pu être étudiés et encore moins réglementés

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