Jeudi 15 janvier 2009
Pour la 5ème année consécutive,
ma classe va participer à un atelier écriture
avec...
Par Christine DAUMET, enseignante en CM2
Ecole Georges Lapierre, Tournefeuille
Jeudi 15 janvier 2009
Pour la 5ème année consécutive, ma classe va participer à un atelier écriture avec Philippe BERTHAUT.
Grande première cette année : nous ne recevons plus Philippe à l’école, pas plus que nous ne nous déplaçons à la boutique écriture de la Médiathèque de Tournefeuille…Non, cette année, grande première : nous nous rendons dans un lieu consacré entièrement à la poèsie…
10h…nous arrivons rue du Taur …devant la Cave Poésie René Gouzenne, rien
de moins. Ce projet de nous déplacer a été émis par l’animateur lui-même lors de notre dernière séance en 2008. En effet, l’atelier débutant par une lecture de poèmes (les siens, bien sûr), quoi de mieux que de les écouter dans une salle, lus sur une scène dans ce lieu créé par et pour les poètes ?
Nous arrivons rue du Taur, donc, et sur le trottoir nous attend notre barde barbu et chevelu qui nous accueille comme de vieilles connaissances que nous sommes. En effet, les élèves ont pour la plupart participé à ses ateliers écriture avec l’école depuis le CE2.
Après les premiers moments de surprise passés, dû à la découverte de ce lieu magique, tout le monde s’installe dans la salle du bas, on distribue papier et stylos (ah…la magie du bic « à ressort »…clic clac clic clac…et « qu’est-ce qu’on va faire avec? »), on fait le silence, la lumière baisse et…la lecture commence…
« Ce matin en me levant
J’ai cherché un poème
(que j’avais écrit il y a bien longtemps
Mais que j’avais perdu… »
« L’autre jour je suis allé
Voir un poête s’entraîner…
Tout en beurrant ses tartines
Il cherchait des rimes avec le mot tartine
Ne trouva que mandarine… »
Le poème quant à lui s’entraînait avant de se faire écrire à réveiller les lettres qui étaient parties en goguette…Le Z au cirque Zavatta, le F chez le coiffeur, le J parti faire du Ju-Jitsu avec le S et le T…
Sourires, rires, émotions…20 minutes d’écoute, d’attention, qui filent à toute
vitesse.
La lumière se fait et le verdict tombe : « Maintenant c’est à vous…vous avez entendu des poèmes, maintenant à vous d’en écrire… » annonce le poète.
Je suis sereine, plus sereine que la plupart des élèves : en effet, après le premier moment de surprise passé (« Il est fou ! Comme ça? Leur dire d’écrire, sans consigne, sans trame ! ») j’ai déjà vu le miracle se produire, la formidable capacité de ces enfants de dix ans à jouer avec les mots, à produire de véritables petits chef-d’oeuvres. Eux, ils n’en sont pas encore là, ils doutent, ils se demandent s’ils en sont capables. Puis, très vite, la magie opère et les bics (« clic clac clic clac » disent-ils) se mettent à courir sur les feuilles, ne s’arrêtent plus, certains redemandent du papier…
D’autres mettent plus de temps à se débloquer, n’ont « rien à dire », écoutent les encouragements de Philippe, puis se lancent. On échange, on rit, on compare… Vingt minutes plus tard, arrive le moment de vérité : chacun monte sur scène et vient lire son ou…ses poèmes. Poèmes drôles, poèmes tristes, poèmes amoureux, poèmes enragés, tous sont là, prêts à être dits, prêts à être écoutés :
« C’est bizarre, je commence mon histoire par le stylo de Philippe, c’est une
histoire pleine de poésie… »
« …la pollution, trop d’essence gaspillée, ballade-toi, profite, la Terre va
éclater…
Les mots je les connais pas, c’est vous qui les connaissez… »
« Je suis embêtée, très très embêtée, mon poème s’est caché dans une boite
fermée… »
« Je sais pas écrire, je sais que jouer
Quand je joue, je sais tout… »
Écoute, bienveillance, rires et sourires complices, applaudissements, …on en redemande, le temps passe trop vite. Chacun a vu de quoi il était capable (écrire…monter sur une scène, même petite…dire son texte, écrit par soi).
Quoi de plus enrichissant pour donner confiance à ceux qui en manquent ?
Pour prouver que celui qui a des difficultés en classe ne les a plus face à sa feuille blanche et face à ses camarades ? Formidable expérience que certains me demandent de renouveler de retour en classe…Non, car la magie vient aussi et surtout de la présence, de l’écoute, de la complicité établie avec Philippe BERTHAUT . Nous, en classe, on partira sur d’autres choses, mais laissons ce moment poétique reposer dans la Cave Poésie.
13h30, retour à l’école.
« Tu sais quoi, Maîtresse ?
- Non…
- Eh ben , on s’est rendu compte qu’on était des poètes, alors qu’on le
savait pas… »
Rien que pour entendre cela, le Motager de Poèmes, ça valait le
déplacement, non ?"
Christine DAUMET, enseignante en CM2
École Georges Lapierre, Tournefeuille