Vittoz: "la réceptivité, c'est tout".
Très tôt pendant ses stages hospitaliers, le docteur Vittoz note l'influence du psychisme sur les malades. Il s’est aussi intéressé à l’hypnose qui était en pleine expansion à cette époque, qu'il va apprendre à La Salpétrière à Paris auprès du Pr Charcot. Mais cette approche ne le satisfaisait pas pleinement car elle rendait le patient selon lui dépendant du thérapeute et ne lui permettait pas de prendre en mains sa guérison. Il suivra aussi les cours du Pr Richet qui affirmait que toutes les activités psychologiques et psychopathologiques s'exprimaient dans l'organisme. A l'époque, c’était assez révolutionnaire, car les notions de maladie psychosomatique, de somatisation étaient complètement ignorées du corps médical.
Il a mis en place sa méthode par l’observation de ses patients et un travail sur soi, à partir de son expérience d’homme et de médecin. En effet, il a noté que ses patients étaient très rarement présents à leur maladie dans l’ici et maintenant : ils étaient souvent dans leurs ruminations mentales par rapport au passé, ou dans des anticipations ou projections anxieuses sur un avenir, par définition incertain.
Il a lui-même traversé une période de profonde fatigue mentale à la suite d’une maladie infectieuse (une scarlatine) pendant ses études de médecine. Il a souffert d'insomnie et il a pris conscience que sa fatigue physique entrainait une fatigue psychique qui se traduisait par un emballement de sa pensée, et que cela accroissait en retour sa fatigue physique. Il a donc fait un lien très rapide entre le corps et le mental. A un moment, il passa des nuits à pyrograver un meuble en bois. Il observa que ce travail nécessitant de l'attention le reposait, ce fut le début de l'élaboration des exercices. Il découvrit que la seule façon de reposer son cerveau, d’arrêter la « machine à penser », c’est de se mettre en réceptivité, connecté à ses sens (voir, entendre, toucher, goûter) ou de concentrer son attention sur un point.
La période fin du 19ème et début du 20ème siècle, fut une période d’augmentation des maladies nerveuses et d’ébullition intellectuel chez les médecins, avec les premiers grands noms de la psychologie moderne: S. Freud, E. Bleuler, C.G. Jung, A. Forel, J. H. Schultz, J.-M. Charcot, le Pr Pierre Dubois de Berne, le psychologue Pierre Janet de Paris. Tous ses grands noms s’intéressaient à la conscience et à l’inconscient, peu s’intéressaient au corps. C’est l’époque où Freud découvrait l’inconscient, que Janet précisait les termes de subconscient, le docteur vittoz a fait un choix différent : il a choisi de porter son travail thérapeutique vers l’élargissement de la conscience, le développement de l’attention à l’instant présent, l’ancrage corporel dans l’ici et maintenant par des exercices sensoriels, des exercices de concentration et de volonté. Pour Vittoz, être conscient, ce n’est pas penser, c’est sentir. Pour penser juste, il faut sentir juste.
Dans ce contexte, Vittoz a mis au point une psychothérapie à médiation corporelle et sensorielle. Il utilise le corps comme moyen d'accès et de mobilisation de la vie psychique. L’accès au corps se fera par des mises en situation au travers d’exercices corporels et mentaux. Cette médiation va être tout à fait particulière. Elle propose au patient des exercices au départ de façon assez directive, dans sa dimension fonctionnelle. C’est cette partie qui est proposée dans les protocoles FOVEA. Ensuite, les propositions du thérapeute en cure individuelle tiendront de plus en plus compte de la parole du patient qui surgit après le dialogue qui suit systématiquement un exercice, puis de plus en plus en intégrant la dimension symbolique des pratiques Vittoz.
Le Dr Vittoz a fondé sa théorie sur une conception du fonctionnement cérébral et non du fonctionnement de la psyché. En effet il considère que le cerveau a deux fonctions principales, la réceptivité et l'émissivité. Par réceptivité Vittoz entend la capacité du cerveau à recevoir les sensations physiques et sensorielles à travers les cinq sens, à y être présent. Dans cette polarité, le cerveau est à l’état de repos. « J’accueille ce qui vient, ce qui est ».
En mode émissivité, le cerveau après traitement des informations reçues, va émettre des pensées, des images mentales, des émotions, une réflexion, une décision. "Je concentre toute mon énergie psychique en un point – je suis concentré, focalisé"
Le contrôle cérébral terme forgé par Vittoz est la capacité que nous avons de passer d'une fonction à l'autre quand nous le décidons, d’une manière libre et souple.
Dans son unique livre de 1911, « Traitement des psychonévroses par la rééducation du contrôle cérébral » bien avant les grandes découvertes en neurosciences sur la neuroplasticité, les neurones miroirs par exemple, il parle du cerveau et de l’importance d’apprendre à mieux le contrôler. En effet, il écrit « cette méthode a pour base que tout état psychasthénique (la psychasthénie appartient à la famille des troubles de la personnalité, et désigne l'appréhension et les difficultés à agir et prendre une décision - Janet) est dû à un fonctionnement défectueux du cerveau, et que c’est là, que nous devons trouver le remède ». Pour Vittoz, la plupart des troubles psychiques provenaient d'une insuffisance du contrôle cérébral. En effet, chez les patients angoissés, anxieux fatigués ou stressés, la fonction émissive est incontrôlée. Ils ne peuvent plus s’arrêter de penser, de cogiter. Cette pensée incessante crée un état de fatigue et de stress. Les exercices vont faire prendre conscience au patient qu’il a un moyen d’arrêter sa pensée, de la mettre au repos en se rendant attentif à l'instant présent (arrêter le petit vélo ou le hamster dans sa roue, image chère à Serge Marquis).
L'objectif de la thérapie Vittoz est de remédier à la cause du déséquilibre et non pas simplement au symptôme. Vittoz situait l’origine du déséquilibre dans l’enfance. En effet, face à des frustrations répétées ou à des chocs émotionnels non conscientisés, l’enfant, pour fuir un réel difficile ou perturbant, se replie sur lui-même se coupant de ses sensations et de ses émotions, s’absentant dans un vagabondage mental qui s’interpose entre lui et la réalité. La méthode Vittoz est une approche de rééducation du fonctionnement du cerveau, pour réapprendre à devenir réceptif, à se relier à ses sens et son corps, pour redevenir présent et attentif à l'instant présent, pour remettre de la gratuité, de la gratitude et de la consolation, d'abord pour soi, puis dirigé vers les autres par transmission consciente.
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Patrick BOBICHON
Praticien de la psychothérapie Vittoz
Instructeur FOVEA
Coordinateur de l'étude scientifique FOVEA (IRDC)
Directeur de la formation d'Instructeurs FOVEA (IGF)
Pour Particuliers, Groupes et Organisations
En cabinet, sur site et par visio
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